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Introduction aux comptes de la seigneurie de Lamballe de 1521 à 1564
dimanche 19 février 2023, par
La précédente étude concernait la série des comptes de la seigneurie de Lamballe comprise entre le dernier quart du XIVe siècle et la fin du XVe siècle. Pour la période du XVIe siècle, les comptes de la seigneurie de Lamballe sont regroupés dans les liasses AD22 1 E-57 (comptes des fermes des seigneuries de Lamballe, Guingamp, Moncontour, la Roche-Suhart, ports et havres d’entre Couesnon et Arguenon ainsi que les sécheries de Cornouaille) ; 77 (receveurs généraux) ; 78 (fermes) ; 84 (comptes de 1521 à 1564) ; 415 (fermes) et 417 (compte).
Le premier compte du XVIe siècle conservé (1521-1524) fut celui de Jean Visdelou. Pour la présente étude nous avons fixé pour limite la ferme de 1602 qui, semblable aux précédentes, correspond au type de contrat pratiqué, après le décès du duc d’Etampes, avec la gouvernance de Sébastien de Luxembourg, de Marie de Beaucaire et enfin des Mercoeur (voir infra). A part le début du XVIe siècle, les périodes de lacunes correspondant à la perte de documents furent peu nombreuses : 1500-1521 ; 1544-1550 ; 1553-1557. En effet, la première vingtaine d’années de cette série est inexistante, ceci pour des raisons liées à des circonstances historiques concernant la détention du Penthièvre malgré les tentatives au nom de ses droits, de Jean de Brosse pour récupérer cette terre alors aux mains de la famille d’Orange. Rien n’était encore réglé au décès de Jean de Brosse, survenu à Grasse en Provence, le 1er août 1524, lorsque ce dernier était à la suite du connétable de Bourbon et au service de l’empereur Charles Quint, le Penthièvre continuant de passer d’un prince à l’autre au gré du roi. Le prince d’Orange Philibert de Châlons s’étant aussi rallié à l’empereur Charles-Quint, le roi François Ier avait donné cette terre à l’amiral Bonnivet qui put en jouir jusqu’à sa mort. Le 28 mars 1524, la reine Louise, mère du roi, régente du royaume, donna les mêmes terres, ports et havres à Louis de Lorraine, comte de Vaudemont. Il en jouira jusqu’au 16 octobre 1531, jusqu’à ce que le roi, par lettres données à Villers-Cotterets, réunit Lamballe et autres terres de Penthièvre au domaine du duché de Bretagne. Elles en furent à nouveau détachées en faveur de Claude de Lorraine, duc de Guise qui en jouissait en 1533 et 1534 sans avoir malgré cela la propriété. Dans une procuration du 18 juillet 1534, il prendra même la qualité de comte d’Aumale et de Penthièvre, seigneur de Lamballe et Moncontour (Cornillet, Notes Historiques sur Lamballe 1823, 1993, p. 169). Les diverses confiscations du Penthièvre, les guerres et plus encore les jouissances viagères des princes d’Orange, de l’amiral Bonnivet, du comte de Vaudemont et autres avaient tellement dispersé les titres et papiers de cette terre que la plupart des vassaux de la seigneurie de Lamballe refusaient d’acquitter les rentes et autres droits en dépendant. Aussi le 26 avril 1533, la cour de Lamballe, sur les remontrances de Jacques Turnegouët, son procureur députa Jean Thomelin, l’un de ses greffiers et notaires, pour se rendre à Nantes, afin de recueillir à la chambre des comptes, les titres relatifs à la seigneurie de Lamballe qui pourraient encore s’y trouver et enjoignit à Alain Bertho sieur du Pont-Grossart, receveur de cette seigneurie, de lui payer 20 livres pour son voyage (Cornillet, op.cit., p. 170). Avec le traité de Crémieux (1536) le rétablissement de la famille de Brosse permit au Penthièvre de retrouver la stabilité, au moins jusqu’à la Ligue.
Les receveurs
Jean Visdelou
Le premier receveur connu par les comptes du XVIe siècle fut Jean Visdelou, seigneur du Colombier (Hénon) ; il fut également capitaine de Moncontour. Cadet de la cinquième génération connue de l’ancienne famille des Visdelou du Pont-à-l’Asne, il était le fils d‘Eonnet et d’Isabeau Le Cointe. Par son mariage en 1510 avec Marguerite Abraham de la paroisse de Saint-Alban il devint seigneur de l’Hôtellerie-Abraham puis de la Goublaye, manoir avec seigneurie qu’il acquit de la famille de la Motte en 1512.
Jean Guillou
Lui succéda Jean Guillou, receveur pour lequel peu d’éléments se révèlent en dehors du fait qu’il présenta trois comptes au nom du roi de France François Ier (1525-1526 ; 1526-1528 ; 1528-1529).
Jean Bertho
Son successeur Jean Bertho faisait partie de cette importante famille de notables du Penthièvre et plus précisément de la région de Lamballe. Il naquit de Jean et de Françoise Dolo. Peu avant 1535, ayant acquit une terre de la famille de la Roche, seigneur du Pont-Grossard et de la Cherquetière en Maroué, il y fit élever un manoir. « Alain Bertho, receveur de la seigneurie de Lamballe ayant fait une rapide fortune, fit sculpter la jolie porte qui décore la façade de son ancienne demeure ... ». Sa fortune suscita des jaloux et il fut dénoncé pour tenir maison et hostellerie dans sa maison du Pont-Grossard, ce qui était moins noble que d’être officier du comte de Penthièvre. « Alain Bertho fit valoir auprès des juges que son rôle d’hôtelier n’était pas incompatible avec sa situation, car il rendait service à des gens qui osaient lui confier leur bourse ... » (Frotier de la Messelière, Recueil généalogique, 1902 ; de la Motte Rouge, Vieilles demeures et vieilles gens de la châtellenie de Lamballe, 1977, p. 455). Il rendit trois comptes (1529-1534 ; 1534-1536 : manquant ; 1536-1537).
Thomas Martel
Thomas Martel, sieur du Val en Mégrit (au diocèse de Saint-Malo), fut receveur de Lamballe pour la période 1538-1545. Le 3 janvier 1538 (n.s.) il reconnut avoir reçu de Me Jean le Royer et de Jacques Beloce stipulant pour Jehan de Bretagne duc d’Etampes, des lettres du 18 novembre 1537 qui l’instituaient receveur de la seigneurie de Lamballe et déclarait Me Thibaut Grossetête seigneur de Quenguen (Maroué), comme caution (AD22 1 E 77, cette pièce est manquante). Le 1er juin 1541, il paraissait comme lieutenant et substitut de Toussaint de Comaille procureur spécial de Claude d’Annebaud seigneur de la Hunaudaye (AD22 1 E 173 ; voir infra Toussaint de Comaille). Avant de recevoir la charge de receveur, Thomas Martel fut notaire de la cour de Lamballe (AD22 1 E 84, compte 1536-1537, f° 39°).
Roland Roquet
Malgré les lacunes, il est parfois possible d’identifier le receveur du compte perdu ou de la période envisagée. Ainsi Roland Roquet apparaît dès le 1er avril avant Pâques 1545 dans une visée de compte d’un an et demi (AD22 1 E 57) où il paraît succéder à Thomas Martel dont la charge finit le 31 mars 1545 (n.s.) ; fonction qu’il dut garder jusqu’à sa mort survenue à la mi-septembre 1550, laissant la place à Joachim Masson (AD22 1 E 84, compte 1550-1553, f° 1). Une publication de la ferme générale de la seigneurie de Lamballe datée du 26 décembre 1546 et faite par Bertrand Lapie, bannier ordinaire de cette cour et après avoir instruit Roland Roquet, receveur ordinaire de cette même cour, nous apprend que le compte commençait le 1er janvier 1547 (n.s.) et devait durer deux ans révolus ; cette publication prévoyant les rabais éventuels aux fermiers en cas de peste ou de famine (AD22 1 E78). Auparavant on le voit comme fermier des moulins d’Hillion, qu’il prend pour la ferme de 1540-1542 (AD22 1 E84, compte 1538-1545, f°16°). La famille Roquel (ou Roquet) figurait à ces époques aux réformations des paroisses d’Hillion (un pont de cette paroisse porte encore le nom de Pont Roquet) et de Bréhand. ; au vu de ses activités ce receveur devait probablement être originaire de la paroisse d’Hillion.
Joachim Masson
Peu d’éléments concernent Joachim Masson en dehors de son activité de receveur qu’il laissa à l’été 1553. Dans son compte, il est clairement indiqué qu’il était estrangier (AD22 1 E 84, compte 1550-1553, f° 41). Au vu des baillées précédant la nomination de Jean Rabel en avril 1557, le receveur précédent fut Jean de Trémereuc (AD22 1 E 84, compte 1557-1561, f° 7) dont la comptabilité (1553-1557) semble avoir été perdue. La famille de Trémereuc est bien connue en Penthièvre ; ce receveur venait-il de la maison de Tanio en Hillion ?
Jean Rabel
Jean Rabel, sieur de Créhen (Plurien), produisit deux comptes (1557-1561 et 1561-1564). Il semble avoir été le dernier des receveurs traditionnels et fut le dernier du duc d’Etampes qui décéda peu avant la conclusion de son compte. En 1559, furent entrepris d’importants travaux à la chapelle du moulin Turquais en Erquy : le marché fut passé avec un charpentier de Saint-Denoual, en la maison du Maupas au bourg de Plurien, chez un certain Jean Rabel (Le Gal La Salle, Histoire d’Erquy, 1991, p. 275) ; s’agissait-il de notre receveur ? Lors de la montre générale des nobles, anoblis et autres tenants de fiefs nobles de l’évêché de Saint-Brieuc, tenue à Lamballe le 10 juillet 1569, il est représenté par son fils Julien comme arquebusier à cheval (AD22 C7, f° 30°). Dans le même temps, on retrouve parfois la présence de Jean Rabel lors des baptêmes en l’église Notre-Dame de Lamballe où il apposa sa signature sur les registres.
Autres personnages
Cette liste ne se veut en aucun cas exhaustive, les biographies des autres officiers de la juridiction (sénéchaux, alloués, lieutenants et procureurs fiscaux) n’étant pas abordées dans ce cadre.
Jean d’Estrées
Durant sa gouvernance, le duc d’Etampes agissait par procuration ; aussi, à cet effet, il désigna successivement trois procureurs spéciaux. Jean d’Estrées paraît pour la première fois lors de la présentation par Alain Bertho, receveur de Lamballe, de son troisième compte et le premier rendu au duc d’Etampes. Il est alors auréolé des titres de seigneur dudit lieu d’Estrées et de Viergy, lieutenant de cinquante hommes d’armes, gentilhomme de la chambre de monseigneur le dauphin et procureur spécial du duc (AD22 1 E 84, compte 1537-1537, f° 1). Il reçut de Jean de Bretagne une procuration générale avec pouvoir d’instituer et de destituer les officiers, de recevoir les hommages, les comptes et d’affermer les terres (AD22 1 E 19). Il est également désigné comme son gouverneur (AD22 1 E 84, compte 1538-1545, f° 8°) mais aussi de maître d’hôtel du duc (AD22 1 E 84, compte 1538-1545, f° 12 et suivants). Il est probable que ce seigneur fut apparenté à cette famille d’Estrées originaire d’Artois. Celle-ci figure au nobiliaire de Potier de Courcy, pour avoir fourni des lieutenants généraux au comté nantais, un commandant en chef en Bretagne, deux abbés de Vertou et un abbé de Villeneuve (Kerviler, Biobibliographie Bretonne, 1901, réédition 1978, t. 7, p. 283) Jean d’Estrées finit sa fonction (décès ou autre raison ?) au cours de ce compte 1538-1545 car apparaît alors et ce dès septembre 1543 (ordre de commandement) Guy de Torigné qui suit (AD22 1 E 84, compte 1538-1545, f° 40).
Guy de Torigné
Le second procureur fut Guy de Torigné seigneur du Boisnerbert maître d’hôtel du duc et son procureur spécial. Le fief de Nerbert devenu Boisnerbert dont le premier seigneur connu appartenait à la famille Chambert qui le conserva jusqu’à la fin du XVIe siècle se trouvait dans l’actuelle commune des Deux-Sèvres, Neuvy-Bouin (INSEE 79190) ; cette commune a été formée par la fusion en 1791, des paroisses de Neuvy et de Bouin. Guy de Torigné avait épousé Jeanne de Culant (d’une famille originaire de Brie et dont une branche était établie en Saintonge). En dehors des ordres de commandement donnés dans les années qui suivirent 1543, sa présence est attestée lors de la présentation en 1545, du compte du receveur Thomas Martel (AD22 1 E 84, compte 1538-1545, f° 1). Ses interventions sont peu connues du fait de la lacune dans la succession des comptes (1545-1550). Il cessa son activité vers la fin de 1550.
François de Mars
Autre personnage important François de Mars seigneur de Saint-Agathe qui apparaît dès janvier 1551, en qualité de maître d’hôtel et procureur spécial du duc d’Etampes (AD22 1 E 84, compte 1550-1553, f° 7° et 10°). Il suffit de parcourir les comptes pour constater son omniprésence dans les affaires du duc. Un registre conservé, se présente comme un état des dépenses qu’il fit comme « agent » du duc d’Etampes pour les réparations aux différents domaines du duché (AD22 1 E 29). Selon maître Cornillet dans son ouvrage sur Lamballe, il fut receveur général du Penthièvre (Cornillet, op.cit., p. 378). Le 8 mars 1553, un certain Roland Chiquet, ayant pour caution Julien Bertho sieur de la Croix, bailla a titre de ferme pour un an entier commençant le 1er janvier 1553 (n.s.), la terre et seigneurie de Lamballe, lesquels subrogèrent en cette ferme François de Mars seigneur de Saint-Agathe, procureur du duc d’Etampes. Dans ce document François de Mars est présenté comme capitaine de Guingamp (?). A propos de cette ferme, il est dit qu’elle concernait la terre et seigneuryie, fruictz et revenuz de Lamballe tant ordinaires que extraordinaires, sequelles et appandance et deppendance dicelle que Bertran de Gripon, Guillaume de Gripon, Thoumas Le Nepvo faisoint comme commis au gouvernement de la dicte terre et seigneurye de Lamballe en vertu de la saezyie que en avoict faict faire Pierre Lusault. La dite ferme de la dite terre et seigneurye estoict revenue au dit Chiquel comme darroin boucteur et encherisseur au pris de troys centz dix livres cinq soulz tournois ... (AD22 1 E 78). Lors de la présentation des hommages de la seigneurie de Guingamp, en janvier et février 1553 (n.s.), il fut donné procuration par le duc d’Etampes, à François de Mars sieur de Saint-Agathe et à Raoul de Cléauroux sieur de Kerauffret, commissaires nommés à cet effet afin de recueillir les hommages des vassaux (AD22 1 E 1077). Il avait épousé Jeanne Le Nepvou peu après septembre 1558 ; cette dernière était alors veuve de ce même Raoul de Cléauroux sieur de Kerauffret, ancien sénéchal de Lamballe et décédé le 14 septembre 1558, dont elle demandait alors le paiement des arriérés de ses gages ; elle se déclarait alors dame de Saint-Agathe et de la Villepiel (Villepied) (AD22 1 E 84, compte 1557-1561, chapitre des mises, f° 14°). Selon R. Le Nepvou de Carfort, Jeanne Le Nepvou était la fille de Guillaume Le Nepvou (... 1469-1506 ...) qui semble avoir épousé une fille de la maison de Carmelo ; dans quelques actes, Jeanne Le Nepvou est dite dame de la Villepied, terre située en Plélo (Vte René Le Nepvou de Carfort, Etude généalogique sur la maison Le Nepvou de l’évêché de Saint-Brieuc, Saint-Brieuc, 1913, p. 60, 63 et 64). Il semble qu’un temps, le seigneur de Saint-Agathe porta également le titre de sieur de la Villepied, terre de son épouse, lors des baptêmes en l’église Notre-Dame de Lamballe (AD22 salle virtuelle ; registres des baptêmes de Notre-Dame de Lamballe, liasse 1520-1648, vue 99 droite). Lorsque le duc d’Etampes fit son testament en son château de Lamballe, le 25 janvier 1566 (n.s.), son maître d’hôtel le sieur de Saint-Agathe fait partie des ceux qui auront charge d’exécuter son testament (dom Morice, Preuves, col. 1343 à 1345).
Jean de Seve
Personnage énigmatique dont la fonction n’a pu être établie (diplomatique ou ecclésiastique) et dont la signature figure au bas de deux actes de baptêmes des années 1561-1562, avec la mention Jehan de Seve pour Jehan de Bretaigne (AD22 salle virtuelle ; registres des baptêmes de Notre-Dame de Lamballe, liasse 1520-1648, vues 98 et 99).
Jacques du Buisson
Autre personne de premier plan dans l’entourage du duc, son « argentier et controlleur » Jacques du Buisson qui se trouva gratifié, en vertu d’un mandement du duc, en date du 23 juin 1561, ordonnant à Jean Rabel, son receveur, de lui verser une rente de 100 livres à prendre sur le revenu de la halle (AD22 1 E 553 ; belle signature sur papier de Jehan de Bretaigne ; AD22 1 E 84, compte 1561-1564, f° 33° et 37°).
Thomas Le Bottey
Parmi les autres personnes proches du duc d’Etampes se trouvaient un certain Thomas Le Bottey et son épouse Ysabeau Hucher. Thomas Le Bottey apparaît dans les comptes, dès celui de 1557-1561, alors désigné lieutenant d’Apremont, il avait en charge des bastimentz et mesnaiges de Monseigneur (AD22 1 E 84, compte 1557-1561, chapitre des mises, f° 5 et 6°). En effet, par lettre du 26 juin 1561, le duc d’Etampes lui avait donné la provision de lieutenant du pavillon de l’Ecuyer, de la lice et de la maison du Bocage moyennant cent livres de gages et trente-trois pérées de froment par an. Ce lieutenant était tout simplement un concierge de même qu’à Apremont, autre maison du duc (Cornillet, op.cit., p. 182). Le couple devait résider en la maison du Bocage dont il avait la charge ainsi que du jeu de paume dès 1561 (AD22 1 E 84, compte 1561-1564, f° 37°) ; cette maison possédait aussi une métairie avec écuries et autres appartenances, le tout affermé à des métayers pour l’exploitation, biens souvent décrits dans les réparations. A sa mort, sa veuve fut maintenue dans son rôle de concierge de ces domaines où elle est alors appelée la lieutenante d’Aspremont ; en 1570 elle tient toujours la maison du Jeu de Paume (AD22 1 E 78, ferme du 5 décembre 1570). Le 18 avril 1567, Sébastien de Luxembourg ordonnait à Louis du Guémadeuc, son receveur, de payer à Ysabeau Hucher, lieutenant de Lanjouan, soixante-dix-huit livres et treize sols pour des éteules qu’elle lui avait fournies pour jouer à la paume pendant son séjour dans le pays (Cornillet, op.cit., p. 320). Il est fort probable que le receveur de Moncontour Jean Le Bottey sieur de Montgaultier (1604) et qui auparavant avait pris la ferme de Lamballe (1598) fut leur fils (AD22 1 E 26, f° 78 et infra). Dans un premier temps, celui-ci avait pris la ferme du Pavillon et des terres près du jeu de paume, des vignes près du château de Lanjouan et des fiefs appartenant au sieur du Clos Neuf, accordée par le duc et la duchesse de Mercoeur, moyennant 150 écus par an (AD22 1 E 88). La descendance des Le Bottey était encore présente à la maison de la petite Ville-Hervé en Planguenoual jusqu’au début du XIXe siècle.
Toussaint de Comaille
Dans la nébuleuse de l’administration du Penthièvre, le nom de Toussaint de Comaille apparaît à maintes reprises. Comaille se trouve être le nom d’une ancienne famille du pays nantais qui portait d’azur à trois mailles, alias d’argent portant les titres de sieur de la Touche (paroisse de Nozay, 44) et du Boisraguenet (paroisse d’Orvault, 44) (Potier de Courcy, Armorial de Bretagne, t. 1, p. 282). Potier de Courcy mais aussi Kerviler ainsi que des généalogies en ligne font le rapprochement entre ce personnage et le contrôleur général de la marine du Ponant en 1550. Un certain Pierre Pirault, conseiller du roi fut secrétaire de Jean de Laval (1486-1543) petit-fils de Françoise de Dinan, seigneur de Chateaubriand, du Gâvre, de Beaumanoir, de Candé, de Derval et de Malestroit, au demeurant puissant seigneur qui était alors gouverneur de Bretagne ; il fit même anoblir Pierre Pirault en 1538. Pierre Pirault décéda en 1541. Certaines sources évoquent que sa veuve Perrine Vivient épousa Toussaint de Comaille avant 1553 et que par son mariage Toussaint de Comaille devint seigneur de la Touche en la paroisse de Nozay, terre que Pierre Pirault avait acquis pour 400 écus d’or. Nous verrons qu’il n’en est rien car dès 1549, Toussaint de Comaille se déclare sieur de la Touche et qu’il est alors marié à Jacquette Dupin (voir infra). L’hypothèse la plus plausible demeure que Toussaint de Comaille acquit la terre de la Touche à la mort de Pierre Pirault, terre qui échut plus tard à sa fille aînée, Claude de Comaille qui épousa en 1563 Pierre de Cornulier qui fut maire de Nantes.
Dans les nombreuses liasses de la série E (AD22 1 E 373 à 379, 414, 904, 908) figure également un nommé Toussaint de Comaille dont on ne sait rien de son ascendance si ce n’est que curieusement il se prévalait également du titre de seigneur de la Touche en Nozay (AD22 1 E 373) et qui semble bien être notre personnage. Celui-ci semble avoir commencé sa carrière administrative comme receveur de Guingamp dès mars 1529. Le 17 mars 1537 (n.s.), il obtint des lettres du roi François Ier concernant sa régie comme receveur de Guingamp pour huit années finies le mars 1537 (n.s.). Ce document nous apprend que pendant ce temps Claude d’Annebaud maréchal et amiral de France jouissait des revenus de cette seigneurie et que durant ce temps la ville de Guingamp fut désolée par une espèce de peste (AD22 1 E 908).
Par la suite, Toussaint de Comaille passa au service du seigneur de la Hunaudaye non plus comme receveur mais en tant que procureur spécial pour ses affaires. En effet, le 1er juin 1541, dans un acte juridique certifiant une vente, il paraissait comme procureur spécial de Claude d’Annebaud seigneur de la Hunaudaye, mari de Françoise de Tournemine. Le contrat de vente consenti par Jean de Laval sire de Châteaubriant et de Montafilant. Le contrat de vente portait sur la seigneurie de Montafilant au Chemin-Chaussée, s’étendant aux paroisses de Hénansal, La Bouillie, Saint-Alban, Planguenoual, Pléneuf, Saint-Aaron, Erquy, Plurien, Quintenic et la ville de Lamballe ainsi que sur la seigneurie de Châteaubriant en Planguenoual. A cette date Toussaint de Comaille se disait sieur du dit lieu de Comaille (AD22 1 E 173/1). Le 15 mars 1549 (n.s.), un certain Jean Labé sieur de la Touche, agissait par procuration pour Toussaint de Comaille sieur de la Touche en Nozay et Jacquette Dupin dame de Launay et du Beauchereau son épouse. Il s’agissait d’un contrat de vente consenti par Olivier de la Chapelle et autres propriétaires, des seigneuries de Saint-Melaine et de Lanjouan en Lamballe (AD22 1 E 373). Suite à cet acquêt, il y eut opposition par le seigneur de la Hunaudaye. Il fut également passé un traité (1556) entre Jean de Bretagne duc d’Etampes et Toussaint de Comaille concernant cette acquisition (AD22 1 E 373 et 414 ; voir infra, moulin de Lesnée en Plestan). Quelques années plus tard une instance de retrait lignager fut intentée devant le présidial de Rennes par Hélène de la Chapelle contre madame de Martigues et autres acquéreurs des terres de Saint-Melaine et Lanjouan (AD22 1 E 373).
Le 8 avril 1559, Jacquette Dupin, tutrice de Claude et Gillette, ses filles, rendit aveu pour le manoir de Saint-Melaine et diverses pièces de terre et rentes dans les paroisses de Maroué, Meslin et Plestan (AD22 1 E 374). Depuis son acquisition, Toussaint de Comaille se prévalait aussi du titre de seigneur de Sainte-Melaine (Lamballe) terre soumise à rachat lors de son décès qui dut survenir avant septembre 1558, minu de rachat fourni par sa veuve Jacquette Dupin (AD22 1 E 84, compte 1557-1561, chapitre des recettes, f° 17).
Le dernier tiers du XVIème siècle est également bien connu par ses nombreuses fermes ; cependant ces comptes apparaissent dans leurs présentation et forme, bien différents (infra).
Nous ne reviendrons pas sur l’histoire et la dévolution des ces archives au cours du temps. Cependant durant la gouvernance de Marie de Beaucaire, certaines archives (lettres du duc d’Etampes) furent transférées au château de Moncontour selon certaines conditions. En effet, le 9 juin 1576, le présidial de Rennes répondait à une requête de la part de dame Marye de Beaucaire dame de Martigues procuratrice cum libra des sieur et dame de Mercueur duc et duchesse de Penthevre, tendant a ce que certaines lectres demeurees apres le deces du feu duc d’Estampes au chasteau de Lamballe, feussent transportees et mises au chasteau, place et forteresse de Moncontour affin d’eviter a l’enlevement et bruslemant dicelles dont elle estoit en ce temps de troubles menacee par aulcuns malveillans de sa maison et qu’a celle fin le senechal de Montfort commissaire cy davent deputte pour l’apposition des seaulx estans sur les dictes lectres se y feust transporte ou tel autre qu’il eust pleu audict siege deputer. Il est ordonne aiant esgard a dite requeste importance et consequence desdictes lectres, quelles seront en tel estat quelles sont et sans en faire oupverture closes en coffres ou arches deuement seellez, transportees dudict chasteau de Lamballe, mises et enfermees soubz cleff et seaulx audict chasteau de Moncontour et la mises en seurte et personnes chargees de la garde des chambres ou elles seront receues avecq commendement aux officiers des lieulx de s’en prendre garde et faire tenir ledict chasteau clos et qu’a celle fin Me Marc Gerault conseiller audict siege et en sa compagnie ledict senechal de Montfort et le greffier d’office dudict siege se transporteront audict Lamballe pour le assemblement, faire proces verbal du nombre des coffres et fermetures desdictes lectres et des sceaulx sur icelles apposez puis les faire mettre en tonnes (tonneaux) transporter, conduire et mener audict chasteau de Moncontour en toutte seurte et la estre enfermees et gardees, attendant qu’elles soint inventairiees et certiffiees. Et de ce que faict y aura este raporte et delivre par lesdictz commissaires, bon et entier proces verbal, pour servir ainsi que de raison. Faict à Rennes le neuviesme jour de juing mil cinq cens soixante seize. [Signé :] Dollie (AD22 1 E 30).
Tous ces comptes et leurs apurements (quand ils subsistent) ont été dépouillés de manière exhaustive, au mot près, seuls les doubles ne l’ont pas été ; ces derniers (peu nombreux et concernant seulement la fin du XVIe siècle), furent rapprochés des premiers transcrits par nos soins.